Le cycle accès nord du Défi d’offre de logement a donné lieu à plusieurs idées excitantes. Découvrez les candidats qui ont atteint la deuxième étape. La consultante Amanda Buffalo, spécialisée dans les questions nordiques et autochtones, collaborera avec plusieurs d’entre eux de manière individuelle pour les aider à comprendre la perspective nordique alors qu’ils peaufinent leurs solutions pour ensuite les mettre à l’essai.
Nous nous sommes entretenus avec Amanda au sujet des défis uniques et des conseils en matière de collaboration avec les partenaires, les organisations et les communautés dans les régions nordiques et éloignées du pays.
Pour quelle raison croyez-vous que ce défi est important?
Ma vie, c’est travailler dans le Nord, mais principalement au sein des communautés autochtones. J’ai collaboré avec des sociétés dans le domaine de l’aménagement, des gouvernements des Premières nations, des gouvernements coloniaux, des universités et des institutions – pour faire comprendre les défis auxquels nous sommes collectivement confrontés lorsqu’on parle de logements dans le nord. Je suis également originaire du Nord et j’ai moi-même vécu des problèmes de logement. J’ai assisté à l’échec d’innovations prometteuses, parce que les promoteurs ne comprenaient pas vraiment en quoi consiste la vie dans la région.
Le cycle accès nord du Défi de l’offre de logement offre un soutien pour assurer que les demandeurs ont une vue d’ensemble. Mon rôle, c’est ça : partager cette vision du Nord et offrir une perspective qui aide les gens à élaborer des solutions efficaces.
De quels aspects devrait-on tenir compte lorsqu’on essaie de relever les défis en matière de logements dans les régions nordiques et éloignées?
- La saison de construction est très courte. Il est impossible d’innover et de construire des logements 12 mois par année dans ces régions. Par exemple, on dispose d’à peine quelques mois pour creuser et bâtir les fondations.
- Les matériaux de construction sont difficiles à obtenir. Le transport de ces matériaux est dispendieux et demande un temps énorme. Et, en raison des problèmes d’accès, on doit les recevoir au cours d’une période précise. Autrement, nous devons attendre la saison suivante. Et si les matériaux arrivent tard pendant la saison, il n’existe aucun entrepôt capable de les accueillir, de sorte qu’ils deviennent inutilisables lorsqu’arrive la saison de construction suivante.
- On ne peut pas toujours obtenir les matériaux souhaités. Si on a besoin d’un revêtement de plancher, il arrive qu’on en vende dans un seul endroit – et le choix est souvent limité. Autrement, vous devez vous déplacer plus au sud et payer pour faire livrer les matériaux. Ou vous y allez et vous les transportez vous-mêmes. Je connais des constructeurs qui se rendent régulièrement à Edmonton afin de pouvoir terminer les maisons.
- Le temps est plus froid que vous ne le croyez. Plusieurs solutions fonctionnent à merveille dans d’autres parties du pays, mais survivent difficilement dans le froid extrême qu’on connaît dans le Nord. Je participais l’hiver dernier à un projet de recherche dans le domaine de l’énergie et la solution ne permettait pas de garder ma maison suffisamment au chaud. Je devais utiliser des chaufferettes, ce qui était très dispendieux et peu efficace sur le plan énergétique. Nombreux sont ceux qui doivent encore utiliser des poêles à bois en raison du prix de l’électricité et du mazout dans le Nord.
- Les gens dépendent vraiment du chauffage au bois. Même s’il est formidable de proposer des alternatives efficaces du point de vue énergétique, on s’attend en réalité à rencontrer une certaine résistance si on parle de remplacer le chauffage au bois. Rappelez-vous également que plusieurs communautés nordiques utilisent encore le diesel (surtout dans les endroits où l’on se rend en avion), de sorte que le bois représente effectivement une alternative plus propre. Et qu’en est-il du chauffage électrique et à partir du réseau? Il s’agit là d’un tout autre défi. Les pannes sont fréquentes : il est arrivé qu’un écureuil provoque au sein de ma communauté une panne de courant qui a duré 24 heures. Ceux qui utilisent le chauffage électrique en hiver avaient dû composer avec un problème majeur.
- L’accès à l’Internet n’est pas fiable. Les solutions basées sur la technologie en nuage représentent tout un défi : les gens sectionnent toujours les câbles à fibres optiques lorsqu’ils creusent – ce qui prive l’ensemble du territoire de l’Internet pendant au moins une journée complète. Vous vous souvenez de cette panne du réseau de Rogers qui a touché l’ensemble du Canada au cours de l’été et semé la panique chez les gens? Cela arrive constamment dans le Nord. Nous n’avons pas de jours de neige, mais je trouve que ça ressemble aux jours de neige – et ça se produit en tout temps pendant l’année.
- Plusieurs communautés autochtones sont autonomes. Il est important de tenir compte de la manière dont les choses se déroulent d’un endroit à l’autre. Vous devez connaître la bonne façon d’aborder la communauté que vous désirez servir pour qu’on en vienne à accepter votre solution.
Aimeriez-vous donner d’autres conseils aux demandeurs qui ne viennent pas toujours des régions nordiques?
Vous devez comprendre que la collaboration avec les communautés nordiques et éloignées ressemble à une courbe d’apprentissage. La vie est différente. Les infrastructures sont différentes. Il faut plus de tout pour travailler dans le Nord. Plus de temps. Plus d’argent. Plus d’effort. Plus d’énergie. Plus de patience et plus de capacités pour s’adapter aux conditions changeantes dans le Nord.
Et si vous n’avez pas encore établi de liens étroits dans le Nord, il faut un temps énorme pour gagner la confiance des gens. Les gens cumulent souvent des fonctions différentes et vous pourriez vous retrouver en train de parler à une personne qui assume trois rôles différents – président de la coopérative, directeur du logement et étudiant au campus local. Par conséquent, assurez-vous de faire preuve de gentillesse.
Ajustez-vous au rythme de vie de la communauté, contentez-vous des ressources dont la communauté dispose et faites preuve d’ouverture face au savoir des peuples nordiques. Vous ne pouvez pas simplement venir et imposer vos solutions. Parce que même les idées qui fonctionnent à merveille dans d’autres régions – comme les maisons préfabriquées conçues pour le nord de l’Ontario – ne connaîtront pas nécessairement le même succès dans les territoires.
Un aspect de mon rôle consiste à établir des liens et à faire comprendre ce défi et je me sens si privilégiée d’en faire partie. Je dois poser des questions et aider les gens à penser aux choses dont ils n’ont peut-être pas tenu compte s’ils sont habitués à la façon de faire dans le sud.
Qu’espérez-vous que le défi apportera?
Je suis ravie de constater les solutions concrètes en matière de logement qui permettent de relever certains des principaux défis auxquels sont confrontées les communautés nordiques et éloignées. Nous avons reçu plusieurs demandes pour la première étape du défi et j’aime voir que les gens désirent collaborer avec le Nord et travailler dans le Nord. J’ai hâte de voir les gens qui atteindront le deuxième cycle, ce que leurs idées pourraient nous apporter et la façon dont je pourrai les aider à réaliser leur vision.